La vieille *

Publié par France Théoret

Reprise 1**

 

Il est un temps impérieux 

le présent tyrannique.

 

La tête est la reine

des nuits illimitées

il faut le publier la maladie est autoritaire.  

La parole et les ordres confondus

viennent d’en haut.

 

 La vieille l’entend 

d’une seule note. 

Ce sera une nuit froide

de mars d’avant-printemps

des heures givrées

par le mal offensant.

Elle n’écoute aucune plainte

ni la sienne ni celle des autres

il fait glacial il fait gelé.

 

 

La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)

**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.

Remerciements à André Gervais pour une précision sur la notion de Reprise

 :

 

- La notion de remploi à laquelle je recours ici est à entendre littéralement : elle suppose toujours l’usage d’un objet tangible à des fins nouvelles, et ne doit pas être confondue, même si elle en partage souvent les effets, avec la citation ou l’intertextualité. Les remplois ainsi entendus peuvent être qualifiés de reprises, mot qui condense les sens de « reprendre » et de « repriser », et dit simultanément la capture et la greffe.

 

Jean-Pierre Criqui, « Usages du déjà là (Remarques sur le remploi) », Cahiers de la Villa Gillet, Lyon, no 17 (Les « Moyen Âge » de l’art contemporain), février 2003.

 

La vieille*

Reprise 2**

 

 Le défaut de nos vieilles

se tenir debout habillées

marchant dans la ville.

On veut des vieilles couchées

pas lavées geignant en silence.

 

 Ça ennuie la maladie

nos vieilles n’ont pas la cote

se le tenir pour dit.

 

 Nos vieilles ont commis

des fautes il convient

de les traiter avec dureté.

 

La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)

**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.

La vieille *

La vieille*

Reprise 3**

 

Vicieuse horrifiante la maladie

on dira que la vieille ment 

qu’elle n’est pas exacte 

ni là où elle doit être.                           

 

 La vie extérieure la situe 

en retrait l’oblige à considérer

chaque déplacement 

un dérangement excessif.

 

 Baudelaire a écrit

Nous sommes tous démocratisés

et syphilisés. 

Cela continue

les maladies honteuses

en pleine expansion

l’environnement les multiplie.

Ce n’est rien maintenant

en comparaison avec ce qui vient.

La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)

**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.

La vieille*

Reprise 4**

Prends ton mal et marche

On doit la guerre à la maladie.

Pour le bien de tous 

vaincre ce qui est pourri 

qui doit être corrigé.

 

Que toutes se le tiennent 

pour dit on croit 

qu’elles fabulent qu’elles prennent

trop d’espace.

 

 À votre âge  (disent-ils)

avez-vous entendu autres mots 

(y a-t-il d’autres mots)

la mort est l’étape suivante

ce qui arrive hâte la fin

en accéléré.

* La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)
**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.
 
La vieille *

La vieille* 

Reprise 5**

 

 Sans retour

à sens unique

la maladie compte

les jours sont doubles triples.

Selon la farceuse expression

à votre âge y penser

elle est venue l’heure.

 

 Ravage la ravagée

sous la loupe sévère

de ses semblables

la tête refuse le voile

sous aucun prétexte

le nu commence par là

les cheveux la peau du visage.

 

Les pervers la couvrent la recouvrent

cherchent à la dissimuler

derrière les murs sans fenêtres 

oublier les formes corporelles.

La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)

**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.

La vieille *

La vieille*

Reprise 6**

 

Il est entendu

que ça va encore la vie

personne ne va la cacher pour de bon

ceux qui en veulent à la face

sont les mêmes qui prennent la tête

 leur objet de pensée femme.

 

 La figure - abandonnée

délaissée oubliée

n’est pas rejetée - est recouverte.

 

Ne pas la voir assez indifférent

ne pas en parler

pas de tolérance

pour un âge de la défaite.

 

Calmée la vieille

qu’elle reste chez elle qui voudrait la voir

entendre la maladie

personnifiée des énergies sales

avec vue sur la destruction.

 

La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)

**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.

La vieille *

La vieille*

Reprise 7**

 

 Couche-toi

 Il faut se battre dit le sens commun.

Contre qui comment

si combat il y a si guerre il y a 

personne n’en sait le premier mot.

 

La langue et ses injonctions

incitent à la violence

à la révolte qui n’a pas lieu.

Devant  les autorités 

- réelles et imaginaires - 

crever de soumission

la volonté n’est plus.

Sous le règne gelé

du grand ordre clair

la représentation cadrée

devant l’ennemi lever la tête

au milieu du désastre.

La voix du débat

la véracité du combat

une sortie vers le haut 

est demandée.

 

 

                                       

Titre : La vieille * (Note : le féminin inclut le masculin.)

**France Théoret, Vint la maladie » tiré du recueil « Cruauté du jeu » éditions Les Forges, 2017.

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